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Pourquoi décore-t-on (de boules) un sapin à Noël ?

Une fois l'an, début décembre, un dimanche généralement, la famille entière se réunit dans le salon pour l'un des meilleurs moments de l'hiver : la décoration du sapin de Noël. Des boules, une étoile et des guirlandes lumineuses... C'est féerique !

Mon beau sapin, roi des forêts, que j’aime ta verdure… Qui n’a jamais chanté cette comptine de Noël ? Elle accompagne immanquablement l’un des rites principaux de nos fêtes de fin d’année : l’arrivée du sapin de Noël dans le foyer et son ornementation joyeuse par l’ensemble de la famille. Rien qu’en France les hypermarchés, jardineries et autres vendeurs de rue écoulent chaque année près de six millions de ces conifères. Dans le lot, 10 % d’arbres en plastique. On les juge plus économiques, plus pratiques (ils ne perdent par leurs aiguilles) et, depuis que tous les voleurs d’avenir que nous sommes veillent à effacer derrière eux leur empreinte carbone, on les prétend plus écologiques que les vrais arbres arrachés au milieu naturel.

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« Faux ! » corrige Elipsos, un cabinet conseil en développement durable canadien. Selon les calculs de ces écologues d’outre-Atlantique, ces imitations en plastique, ferraille et PVC, produites pour plus des deux tiers par les usines chinoises, sont plus chargées en C02 que Lance Armstrong ne l’était en vitamines quand il prenait le départ du Tour de France : une bonne quarantaine de kilos d’émissions de gaz carbonique pour un modèle de deux mètres, contre 3,1 seulement pour un arbre naturel de la même taille (à condition qu'il soit recyclé). Il faudrait garder le même sapin artificiel pendant une bonne quinzaine d’années pour qu’il soit plus vertueux qu’un Nordmann. Or, dans notre pays, leur durée d'utilisation moyenne est de six ans à peine !

LE COUP DE GÉNIE DE COLOMBAN

Autre solution : vous en passer carrément. Mais quel dommage ! Parce qu’un Noël sans sapin, c’est un peu comme du jambon en barquette sans exhausteur de goût : c’est carrément fade ! Ce n’est pas pour rien que ce résineux accompagne les fêtes de la Nativité depuis le début du Moyen Âge. En effet, si l’on en croit la légende, la tradition est née dans les Vosges à la fin du VIe siècle, sous l’impulsion de saint Colomban, l’un des plus fameux évangélisateurs de l‘époque, fondateur du monastère de Luxeuil.

En ce temps-là, les rites païens résistent encore à l’influence chrétienne. C’est le cas du culte du sapin, un arbre qui, dans une grande partie de l’Europe du Nord, symbolise la renaissance du soleil. À l’approche du solstice d’hiver, de nombreux foyers scandinaves, francs ou saxons accueillent ainsi un spécimen fraîchement coupé, orné de rubans de couleur et de cierges, ou, tout au moins, quelques branches censées chasser les mauvais esprits.

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Pour lutter contre cette pratique, notre petit père Colomban a une idée. Un soir de Noël, il entraîne quelques moines avec lui pour partir à l’assaut de la colline voisine et de l’immense conifère qui la domine. À l’aide de torches et de lanternes, il illumine cet arbre vénéré par la population locale et plante une croix en son sommet. Les paysans des alentours accourent illico pour admirer le spectacle et nombre d’entre eux, frappés par sa mystique et le prêche du moine, réclament finalement le baptême.

LE COUP DE POUCE DE LUTHER

Fort de ce résultat spectaculaire, la chrétienté va généraliser le procédé, illuminant toujours plus de sapins à l’approche de noël pour convertir les barbares du Nord. Les siècles passent et les premières décorations apparaissent. On attache aux branches des « oublies », de petites galettes fort prisées des gourmands d’alors, et des pommes rouges, évoquant tout à la fois le paradis et le péché originel. Au XIVe siècle, les premières étoiles coiffent les cimes des arbres. Elles symbolisent celle de Bethléem qui, selon la Bible, annonça la naissance de Jésus aux Rois mages et les guida jusqu’à lui.

« L'ENFANCE, C'EST DE CROIRE QU'AVEC LE SAPIN DE NOËL ET TROIS FLOCONS DE NEIGE, TOUTE LA TERRE EST CHANGÉE. »

André Laurendeau

Durant tout ce temps, à quelques exceptions près, les sapins de Noël, réservés aux célébrations publiques, trônent sur les parvis des églises. Mais à partir du XVIe siècle, ils vont retrouver la chaleur des foyers, comme au bon temps du paganisme, grâce aux protestants. Refusant toute forme d’idolâtrie, ces derniers renoncent aux crèches et se tournent alors de plus en plus nombreux vers le sapin illuminé pour honorer la naissance de Jésus. L’usage se répand dans toute l’Allemagne, en Scandinavie et, côté français, en Alsace. Il y restera cantonné jusqu’au XIXe siècle.

LE COUP DE MAIN DES MOSELLANS

À partir de là, tout change. Le sapin part à la conquête du reste du monde ! Les immigrés allemands en importent la tradition aux États-Unis. Le prince Albert, saxon d’origine, y initie son épouse, Victoria, reine du Royaume-Uni. Aux quatre coins d’un empire sur lequel le soleil ne se couche jamais, son peuple se met à l’imiter.

En France, la coutume est dans un premier temps adoptée par l’aristocratie et la grande bourgeoisie parisienne après qu’Hélène de Mecklembourg-Schwerin, nostalgique de son Allemagne natale, l’a introduite à la cour de Louis-Philippe Ier, son beau-père. Mais c’est avec l’annexion de l’Alsace par l’Allemagne, en 1870, et l’exil de nombreux Alsaciens refusant le joug du Kaiser que la tradition va se répandre dans tout l’Hexagone.

Nos compatriotes décorent alors leurs arbres avec des friandises, des rubans, les traditionnelles pommes rouges « paradisiaques » et une toute nouvelle décoration, apparue en Allemagne au début du XIXe siècle : la boule de verre. L’objet prend son essor en 1858. Cette année-là, une grande sécheresse décime les vergers français. Les prix flambent, y compris ceux de la fameuse pomme rouge de Noël. Impossible d’en orner les sapins ! Que faire ? Un verrier de Goetzenbruck, petit village de la Moselle, a soudain l’inspiration. Il souffle ses premières boules dans du verre enrichi de cuivre pour lui donner une belle couleur rouge. Le succès est immédiat ! Et il va durer pendant un bon siècle, l’atelier mosellan soufflant sa dernière création artisanale en 1964, laissant dès lors le champ libre à l’industrie plastique. C'est ce que l'on appelle le progrès et, même si, parfois, ça nous fout vraiment les boules, il paraît qu'il ne faut surtout pas l'arrêter !

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Voilà pourquoi chaque année, à l’approche de Noël, petits et grands se retrouvent autour d’un sapin pour lui accrocher de belles boules de toutes les couleurs et des tas d’autres babioles enchanteresses. Et je ne sais pas vous, mais, moi, de le savoir et de me dire que je vais mourir moins con (et le plus tard possible), ça me fait comme une guirlande lumineuse à un enfant : ça me ravit !

Et puisqu'il se dit qu'en France tout se termine par une chanson, y compris la nuit de Noël, je vous offre trois minutes et quarante-deux secondes de Roch :
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Pourquoi le Père Noël amène des cadeaux (aux enfants sages) pour Noël  ?
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Pourquoi célèbre-t-on la naissance de Jésus (et de mon frère) chaque 25 décembre ?
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Pourquoi les enfants gribouillent (jusque sur les murs) ?
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Pourquoi le jeune marié porte sa moitié à l'heure de passer le seuil de leur domicile (ou de leur suite nuptiale) pour la première fois ?
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Pourquoi associe-t-on le jaune aux cocus (et les cornes par la même occasion) ?
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Pourquoi Bernard Hinault est surnommé le Blaireau (et Laura Flessel la Guêpe) ?
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Pourquoi vend-on les œufs (et les huîtres) à la douzaine ?
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Pourquoi la Terre est ronde (mais pas tout à fait) ?
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Pourquoi les Ferrari sont rouges (une fois sur deux) ?
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Pourquoi décore-t-on (de boules) un sapin à Noël ?

Une fois l'an, début décembre, un dimanche généralement, la famille entière se réunit dans le salon pour l'un des meilleurs moments de l'hiver : la décoration du sapin de Noël. Des boules, une étoile et des guirlandes lumineuses... C'est féerique !

Mon beau sapin, roi des forêts, que j’aime ta verdure… Qui n’a jamais chanté cette comptine de Noël ? Elle accompagne immanquablement l’un des rites principaux de nos fêtes de fin d’année : l’arrivée du sapin de Noël dans le foyer et son ornementation joyeuse par l’ensemble de la famille. Rien qu’en France les hypermarchés, jardineries et autres vendeurs de rue écoulent chaque année près de six millions de ces conifères. Dans le lot, 10 % d’arbres en plastique. On les juge plus économiques, plus pratiques (ils ne perdent par leurs aiguilles) et, depuis que tous les voleurs d’avenir que nous sommes veillent à effacer derrière eux leur empreinte carbone, on les prétend plus écologiques que les vrais arbres arrachés au milieu naturel.

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« Faux ! » corrige Elipsos, un cabinet conseil en développement durable canadien. Selon les calculs de ces écologues d’outre-Atlantique, ces imitations en plastique, ferraille et PVC, produites pour plus des deux tiers par les usines chinoises, sont plus chargées en C02 que Lance Armstrong ne l’était en vitamines quand il prenait le départ du Tour de France : une bonne quarantaine de kilos d’émissions de gaz carbonique pour un modèle de deux mètres, contre 3,1 seulement pour un arbre naturel de la même taille (à condition qu'il soit recyclé). Il faudrait garder le même sapin artificiel pendant une bonne quinzaine d’années pour qu’il soit plus vertueux qu’un Nordmann. Or, dans notre pays, leur durée d'utilisation moyenne est de six ans à peine !

LE COUP DE GÉNIE
DE COLOMBAN

Autre solution : vous en passer carrément. Mais quel dommage ! Parce qu’un Noël sans sapin, c’est un peu comme du jambon en barquette sans exhausteur de goût : c’est carrément fade ! Ce n’est pas pour rien que ce résineux accompagne les fêtes de la Nativité depuis le début du Moyen Âge. En effet, si l’on en croit la légende, la tradition est née dans les Vosges à la fin du VIe siècle, sous l’impulsion de saint Colomban, l’un des plus fameux évangélisateurs de l‘époque, fondateur du monastère de Luxeuil.

En ce temps-là, les rites païens résistent encore à l’influence chrétienne. C’est le cas du culte du sapin, un arbre qui, dans une grande partie de l’Europe du Nord, symbolise la renaissance du soleil. À l’approche du solstice d’hiver, de nombreux foyers scandinaves, francs ou saxons accueillent ainsi un spécimen fraîchement coupé, orné de rubans de couleur et de cierges, ou, tout au moins, quelques branches censées chasser les mauvais esprits.

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Pour lutter contre cette pratique, notre petit père Colomban a une idée. Un soir de Noël, il entraîne quelques moines avec lui pour partir à l’assaut de la colline voisine et de l’immense conifère qui la domine. À l’aide de torches et de lanternes, il illumine cet arbre vénéré par la population locale et plante une croix en son sommet. Les paysans des alentours accourent illico pour admirer le spectacle et nombre d’entre eux, frappés par sa mystique et le prêche du moine, réclament finalement le baptême.

LE COUP DE POUCE
DE LUTHER

Fort de ce résultat spectaculaire, la chrétienté va généraliser le procédé, illuminant toujours plus de sapins à l’approche de noël pour convertir les barbares du Nord. Les siècles passent et les premières décorations apparaissent. On attache aux branches des « oublies », de petites galettes fort prisées des gourmands d’alors, et des pommes rouges, évoquant tout à la fois le paradis et le péché originel. Au XIVe siècle, les premières étoiles coiffent les cimes des arbres. Elles symbolisent celle de Bethléem qui, selon la Bible, annonça la naissance de Jésus aux Rois mages et les guida jusqu’à lui.

« L'ENFANCE, C'EST DE CROIRE QU'AVEC LE SAPIN DE NOËL ET TROIS FLOCONS DE NEIGE, TOUTE LA TERRE EST CHANGÉE. »

André Laurendeau

Durant tout ce temps, à quelques exceptions près, les sapins de Noël, réservés aux célébrations publiques, trônent sur les parvis des églises. Mais à partir du XVIe siècle, ils vont retrouver la chaleur des foyers, comme au bon temps du paganisme, grâce aux protestants. Refusant toute forme d’idolâtrie, ces derniers renoncent aux crèches et se tournent alors de plus en plus nombreux vers le sapin illuminé pour honorer la naissance de Jésus. L’usage se répand dans toute l’Allemagne, en Scandinavie et, côté français, en Alsace. Il y restera cantonné jusqu’au XIXe siècle.

LE COUP DE MAIN
DES MOSELLANS

À partir de là, tout change. Le sapin part à la conquête du reste du monde ! Les immigrés allemands en importent la tradition aux États-Unis. Le prince Albert, saxon d’origine, y initie son épouse, Victoria, reine du Royaume-Uni. Aux quatre coins d’un empire sur lequel le soleil ne se couche jamais, son peuple se met à l’imiter.

En France, la coutume est dans un premier temps adoptée par l’aristocratie et la grande bourgeoisie parisienne après qu’Hélène de Mecklembourg-Schwerin, nostalgique de son Allemagne natale, l’a introduite à la cour de Louis-Philippe Ier, son beau-père. Mais c’est avec l’annexion de l’Alsace par l’Allemagne, en 1870, et l’exil de nombreux Alsaciens refusant le joug du Kaiser que la tradition va se répandre dans tout l’Hexagone.

Nos compatriotes décorent alors leurs arbres avec des friandises, des rubans, les traditionnelles pommes rouges « paradisiaques » et une toute nouvelle décoration, apparue en Allemagne au début du XIXe siècle : la boule de verre. L’objet prend son essor en 1858. Cette année-là, une grande sécheresse décime les vergers français. Les prix flambent, y compris ceux de la fameuse pomme rouge de Noël. Impossible d’en orner les sapins ! Que faire ? Un verrier de Goetzenbruck, petit village de la Moselle, a soudain l’inspiration. Il souffle ses premières boules dans du verre enrichi de cuivre pour lui donner une belle couleur rouge. Le succès est immédiat ! Et il va durer pendant un bon siècle, l’atelier mosellan soufflant sa dernière création artisanale en 1964, laissant dès lors le champ libre à l’industrie plastique. C'est ce que l'on appelle le progrès et, même si, parfois, ça nous fout vraiment les boules, il paraît qu'il ne faut surtout pas l'arrêter !

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Voilà pourquoi chaque année, à l’approche de Noël, petits et grands se retrouvent autour d’un sapin pour lui accrocher de belles boules de toutes les couleurs et des tas d’autres babioles enchanteresses. Et je ne sais pas vous, mais, moi, de le savoir et de me dire que je vais mourir moins con (et le plus tard possible), ça me fait comme une guirlande lumineuse à un enfant : ça me ravit !

Et puisqu'il se dit qu'en France tout se termine par une chanson, y compris la nuit de Noël, je vous offre trois minutes et quarante-deux secondes de Roch :
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Pourquoi le Père Noël amène des cadeaux (aux enfants sages) pour Noël  ?
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Pourquoi célèbre-t-on la naissance de Jésus (et de mon frère) chaque 25 décembre ?
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Pourquoi les enfants gribouillent (jusque sur les murs) ?
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Pourquoi le jeune marié porte sa moitié à l'heure de passer le seuil de leur domicile (ou de leur suite nuptiale) pour la première fois ?
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Pourquoi associe-t-on le jaune aux cocus (et les cornes par la même occasion) ?
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Pourquoi Bernard Hinault est surnommé le Blaireau (et Laura Flessel la Guêpe) ?
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Pourquoi vend-on les œufs (et les huîtres) à la douzaine ?
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Pourquoi la Terre est ronde (mais pas tout à fait) ?
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Pourquoi les Ferrari sont rouges (une fois sur deux) ?